"Finissez vos projets" est un excellent conseil ! Si et seulement si...

Avez-vous vu cette vidéo du Sondier Thomas dit Asmoth ? Elle est vachement chouette alors vous devriez.


Par ailleurs Les Sondiers c'est surtout un podcast sur le son. Mais assez de publicité, passons à l'objet de l'article.

"Finissez vos projets", "forcez-vous à dire 'stop j'arrête je le sors'", "imposez-vous de mettre le point final", sont autant de reformulations d'un même conseil de bon sens.

Il m'a fallu un moment avant de trouver où était mon souci, où était la dissonance entre mon acceptation consciente de ce conseil et mon sentiment intérieur qu'il y avait quelque chose à nuancer là-dedans.

Ce n'est pas une critique de cette vidéo, mais plutôt une mise en lumière d'à qui elle s'adresse.

C'est un bon conseil, si vous êtes adulte

J'ai repensé à la période où je m'amusais beaucoup mais où je ne produisais pas grand-chose de fini : entre 12 et 20 ans environ.

Pourquoi on crée, quand on est adolescent ? Pour ma part, c'était en grande partie une activité solitaire qui avait pour but de me changer les idées. Ma croissance était stressante, ma famille était stressante, et il arrivait au collège ou au lycée de me stresser aussi.

J'ai beaucoup de textes commencés et de dessins faits sous Paint qui datent de cette époque. Je n'ai quasiment jamais rien fini et je ne m'en suis jamais mal portée : ce que je faisais dans mon coin n'intéressait personne alors je n'étais pas à la recherche de la validation d'un public. Ce n'était pas la recherche de perfection qui m'arrêtait, c'était l'ennui.

Je dirais même qu'à seize ans, quand j'ai essayé d'écrire sérieusement un feuilleton, je me suis retrouvée bloquée par les obligations que je m'étais imposées. J'avais déjà des obligations envers le lycée et envers ma famille, m'en ajouter dans mes loisirs a détruit ce qui en faisait des loisirs.

La seule nuance que je mettrais donc, c'est que si vous êtes adolescents, ce n'est pas grave de ne pas terminer vos projets, ce n'est pas choquant d'en ouvrir d'autres, ce n'est pas une perte de votre temps de papillonner. Déjà vous avez assez de boulot par ailleurs, pis votre cerveau a même pas fini de transitionner de l'innocence à la maturité.


Mais pourquoi on change, en fait ?

Quand j'ai vieilli - pire que ça, quand j'ai eu fini mes études - j'ai commencé à me poser la question de ce à quoi sert l'écriture. Si vous étiez sur ce blog en 2009 ou en 2010, vous avez peut-être lu des nouvelles bancales qui n'allaient nulle part et qui ne racontaient rien. Pourtant, j'étais contente de les avoir écrites et je n'avais aucun scrupule à les publier.

Puis je me suis relue. Aligner des mots ne suffisait plus, je me demandais si c'étaient les bons mots et le bon alignement.

Et là, clairement, je suis tombée dans une recherche du "bon" qui n'existait pas auparavant dans ma démarche. J'ai commencé à faire des plans préliminaires au lieu d'écrire au fil de la plume. J'ai changé ma façon de traiter ce loisir créatif précis et, cette fois-ci, ça a fonctionné sans me paralyser ni m'ennuyer.

Je ne sais pas pourquoi on change, mais je sais pourquoi j'ai changé. Vivant seule, sortie du système scolaire, j'avais enfin du temps qui m'appartenait, qui n'était pas volé à une institution ou une autre. Gérant mon propre emploi du temps, j'avais enfin la place nécessaire pour "organiser" mes loisirs et penser le processus d'écriture comme un moyen d'obtenir un texte et plus comme un moyen d'échapper à la réalité.

D'ailleurs, il n'y a pas que l'adolescence qui soit une mauvaise période pour "se forcer à finir" : être très malade, être en danger financièrement, être débordé par un boulot trop important sont des circonstances qui empêchent de considérer comme important le fait de finir quelque chose d'aussi futile qu'un roman ou un EP. Voire même, si le processus de création est une bouée de sauvetage au milieu de ses problèmes, les circonstances peuvent donner envie de ne jamais y mettre fin.

En fait, il n'y a pas que la recherche de la perfection qui peut être un obstacle à la conclusion.

En fait, "finissez vos projets personnels" est un bon conseil quand on est indépendant et que tout va bien.

En fait, "finissez vos projets personnels au lieu de vous torturer avec" peut aussi se formuler comme "si vous n'avez pas de problèmes, ne vous en créez pas".

Ce qui en fait définitivement un conseil de bon sens.


Asmoth a aussi fait une vidéo sur la créativité assistée par la contrainte, que je vous recommande aussi car elle est autant de bon sens :




Je profite de cette fin d'article pour confirmer que je ne suis absolument pas de retour de façon régulière avec ce blog. Ce petit article écrit vite-fait est une tentative de réapprendre à bloguer, justement. Une très bonne fin d'été à vous :)

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